Connexion
Menu principal

Les Publications de l'O.U.I.

Les publications, classées par thèmes, concernent des informations ou articles conjoncturels : brèves, chroniques ou la description de projets en cours.
Les documents d'étude plus approfondis sont réunis dans la rubrique cyberfac.
Vous pouvez les commenter et engager un dialogue avec l’auteur ou avec d’autres lecteurs (bouton "poster commentaire ci dessous ")
N’hésitez pas à proposer vous-même des articles ou brèves relatifs aux sujets traités sur le site : ils seront publiés après validation par l’équipe de rédaction du site.




Edito : Internet et solidarité humanitaire
Posté par L'équipe OUI le 3/1/2005 8:08:26 (9363 lectures)

L’observation et l’analyse des usages sociaux de l’internet inclut le décryptage d’expressions telles que internet solidaire, internet citoyen, internet équitable, internet militant... L’attribution à un outil ou à un ensemble d’outils d’une qualité morale, la solidarité, la citoyenneté, l’équité, semble inappropriée, même s’il nous arrive de l’utiliser nous mêmes par commodité : en effet à un outil technique peuvent être associées des caractéristiques techniques, par exemple l’internet haut débit, l’internet sécurisé, mais non des qualités morales (ou des défauts) qui s’appliquent à des personnes, à savoir les utilisateurs, et aux usages qu’ils en font. L’outil internet favorise-t-il le développement d’usages allant dans le sens d’une plus grande solidarité entre humains, de plus d’équité ou d’un sens plus élevé de la citoyenneté ? Voilà ce que nous nous proposons d’analyser dans une suite de contributions dont la première concernera la solidarité humanitaire.


L’observation et l’analyse des usages sociaux de l’internet inclut le décryptage d’expressions telles que internet solidaire, internet citoyen, internet équitable, internet militant... L’attribution à un outil ou à un ensemble d’outils d’une qualité morale, la solidarité, la citoyenneté, l’équité, semble inappropriée, même s’il nous arrive de l’utiliser nous mêmes par commodité : en effet à un outil technique peuvent être associées des caractéristiques techniques, par exemple l’internet haut débit, l’internet sécurisé, mais non des qualités morales (ou des défauts) qui s’appliquent à des personnes, à savoir les utilisateurs, et aux usages qu’ils en font. L’outil internet favorise-t-il le développement d’usages allant dans le sens d’une plus grande solidarité entre humains, de plus d’équité ou d’un sens plus élevé de la citoyenneté ? Voilà ce que nous nous proposons d’analyser dans une suite de contributions dont la première concernera la solidarité.

Internet solidaire
Plusieurs associations ont inclus le terme d’internet solidaire dans leur raison sociale : ainsi, l’une des premières, l’association IRIS (Imaginons un Réseau Internet Solidaire) et l’une des plus récentes, l’Association Nord Internet Solidaire (ANIS). Mais de quelle solidarité s’agit-il et entre qui ?
Selon le dictionnaire « le Robert », sont solidaires « des personnes qui se sentent liées par une responsabilité et des intérêts communs » Dispositif mondial de communication et d’information, l’internet va évidemment jouer un rôle important dans le développement d’usages faisant appel à la solidarité : solidarité familiale, communautaire, professionnelle, humanitaire…; le développement de logiciels libres a constitué l’un des premiers usages de l’internet faisant appel à une forme de solidarité et de coopération entre développeurs de logiciels.
Restreignons nous dans un premier temps à la solidarité humanitaire et plus particulièrement à la collecte de fonds par l’internet.

Internet et collecte de fonds par les ONG : l’actualité
Sujet d’actualité : la collecte de dons associés au raz de marée du 26 décembre 2004 en Asie du Sud pourrait, du fait de l’ampleur de la catastrophe et du mouvement de mobilisation mondial qu’elle soulève, marquer une étape importante dans le rôle de l’internet dans l’évolution de cet usage. L’analyse des pratiques constatées et des chiffres permettra de le préciser.

On peut néanmoins dès maintenant faire un certain nombre d’observations :
- Différence de réactivité selon les associations concernées : certaines ont réagi très rapidement : ainsi la fédération internationale des Sociétés de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, a-t-elle dès le 27 décembre publié sur son site un dossier d’information sur la situation, lancé un appel à dons, rapidement relayé par la plupart de ses instances nationales, et «activé son Service des Recherches afin de localiser les personnes disparues, mais également pour établir une liste des personnes blessées et décédées en coordination avec les Sociétés Nationales de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge des pays concernés par la catastrophe. »( http://www.ifrc.org/fr , http://www.croix-rouge.fr , http://www.familylinks.icrc.org/) : tout un dispositif construit autour de l’internet est donc déclenché.
D’autres ONG ont été plus lentes : plusieurs n’ont pas actualisé leur site internet avant le 30 décembre : si internet permet une très grande réactivité, encore faut-il que les organisations et les hommes qui les constituent la mettent en œuvre.
- Traitement par les média : s’ils ont souvent relayé cette information sur leur site, les médias mentionnaient rarement à l’antenne les adresses des sites internet des associations concernées.
- Réactions du public : Il semble également qu’au don « en ligne » impersonnel et solitaire, beaucoup ( du moins c’est ce que nous en font voir les média) préfèrent une solidarité expressive et chaleureuse telle que la mobilisation physique autour d’urnes disposées dans un lieu public par des bénévoles pour recueillir leurs dons.
On pourra aussi réfléchir a posteriori sur le rôle qu’auraient pu ( et du) jouer les technologies de l’information et de la communication si les infrastructures en téléphone et internet avaient été plus développées et si un dispositif d’alerte avait existé : des scientifiques ont en effet indiqué que, avertis par leurs observations de l’imminence du raz de marée, ils n’ont pu faire parvenir l’information dans les zones menacées (cf "plaidoyer pour des systèmes d'alerte aux raz de marée", J.C. Sibuet, Le Monde 4.1/05, p.21).

Internet et collecte de fonds par les ONG
Une étude très détaillée, documentée et pertinente du rôle actuel et potentiel de l’internet pour la collecte de fonds avait été réalisée en 2000 par Jean Philippe Henry dans son mémoire de recherche « Trop éthique pour être @u Net ? », disponible sur le site de l’OUI. Elle reste d’une grande actualité et mériterait d’être complétée en particulier par les évolutions de la question en particulier en France et par la mise à jour des références.
Depuis se sont par exemple développées les initiatives du Comité de la Charte qui réunit des associations humanitaires soucieuses de garantir à leurs donateurs une gestion éthique et transparente des fonds mis à leur disposition : publication d’une recommandation « communication et collecte de fonds par Internet » et mise en œuvre du site http://aidez.com qui se présente comme le « portail de la solidarité en ligne ». par ailleurs des collectes de dons très organisées s’appuient désormais largement sur l’internet : le site du téléthon fait appel explicitement à la solidarité des internautes : : « moi je me bat et avec toi, internaute, je gagne », accepte que des organisations marchandes agissent comme intermédiaires avec les donateurs. Ainsi peut-on lire, parmi d’autres messages à connotation commerciale : « Pour la cinquième année consécutive, les internautes [nom d’un fournisseur d’accès à l’internet] apporteront leur soutien et ne manqueront pas de relever le défi des années précédentes, en multipliant leurs dons en ligne »
Le processus de sensibilisation associé à l’appel au don concerne tous les médias, mais l’internet y joue sans doute un rôle grandissant et y apporte des éléments nouveaux : information du donateur avant et après l’acte de don, éventuellement dialogue avec des membres de l’association ou d’autres donateurs, voire avec des bénéficiaires, et parfois proposition d’une participation active à l’association et aux décisions concernant les modalités d’emploi des dons.

Rappelons quelques apports techniques de l’internet à la collecte de fonds :
- la réactivité : possibilité de disposer très rapidement d’informations en ligne, provenant des organisations qui sollicitent un don et des acteurs et de témoignages sur les faits eux mêmes et de comparer les propositions de dons faites par plusieurs organisations
- L’interactivité : possibilité d’instaurer un dialogue entre l’association et les donateurs qui acquièrent un certain droit à la parole.
- le paiement en ligne : c’est l’un des moyens de paiement proposé sur la plupart des sites des associations, mais pas le seul. Il suppose la disposition d’une carte de crédit et surtout la confiance dans ce type de paiement et la familiarité avec sa pratique, liée à son utilisation pour des achats commerciaux. De même que la vente d’un produit ne se résume pas à l’acte de vente, la collecte de fonds pour l’aide humanitaire ne se résume pas à un paiement en ligne.

La pratique de la collecte de fonds sur l’internet présente en fin de compte pour chaque acteur des avantages et des risques largement développés dans le travail de J. Ph. Henry, parmi lesquels :

Pour le donateur :
- la possibilité d’être mieux informé et de comparer les conditions de dons proposées par un panel d’organisations
- la possibilité de suivre les actions de l’organisation à laquelle il a choisi de faire un don, voire d’y participer.

Pour l’organisme bénéficiaire :
- Collecte et relance moins coûteuse (comme pour l’état avec l’impôt en ligne)
- Permet de sortir
de ce que J.Ph Henry appelle à de petites organisations d’atteindre un large public
- Association à d’autres services en ligne : information, vente de livres, services spécifiques à l’internet :
- Possibilité de personnalisation et d’un dialogue sur l’emploi du don : courriel, forum…
- Réactivité : exemple Croix Rouge ou par rapport au raz de marée
- Risque de brouiller son image si le don est lié à un message commercial mis au même niveau que des publicités commerciales, ou subtilement récupéré au profit d’organisations marchandes en mal de « parure éthique » qui, en prétendant déclencher la générosité des internautes, récupèrent pour leur compte le « mérite » du don. Les associations, notait J. Ph. Henry, « ont gros à perdre à vouloir suivre les sirènes envoûtantes des sites lucratifs qui leur proposent de s’agglomérer au sein de « supermarchés de la générosité en ligne ».

Ceci dit, à profil social, professionnel et culturel voisin, l’internaute pratiquant le don en ligne donne-t-il plus, mieux ou autrement que le non internaute ? L’usage de l’internet a-t-il une action sur la générosité et la solidarité effective ? Ceci reste encore à établir à partir de l’analyse des modalités et des résultats des différentes opérations de collectes de dons.

Michel Elie 2 janvier 2005

 
Rechercher

 
© 2001-2011 - O.U.I. association loi 1901 - Articles et Brèves sous licence creative commons (by-nc-sa) - - Réalisation: D-LUNE/XOOPS